Si les TIC avancent en Afrique, il faut dire qu’elles n’avancent pas au même rythme partout et en fonction des outils et des régions, on peut voir de grandes différences. Si au Burkina certaines organisations paysannes sont avancées dans le domaine de l’utilisation du numérique, il faut dire qu’au Niger, beaucoup d’efforts restent à faire. Les burkinabè pourront donc dire fièrement : au royaune des aveugles, le borgne est roi.

C’est pour contribuer à faire avancer positivement la numérisation des connaissances dans les organisations paysannes et les associations qui les soutiennent au Niger que le projet Capitalisation de la FAO met en chantier un ensemble de formations pratiques qui d’ailleurs implique également des organisations au Burkina.

L’idée est simple : tout le monde est convaincu des bienfaits du numérique, mais comment y arriver avec des garanties de succès ? Après la foire aux savoirs tenus en juin 2010 à Niamey, le projet Capitalisation a invité les organisations partenaires pour un atelier d’une journée afin qu’elle s’imprègne de leurs situations.

L’association Yam Pukri a été invité à cette rencontre en tant que partenaire et prestataire pour faciliter les échanges et les travaux avec les organisations. Comment construire un grenier numérique à l’ère des TIC ? Quelles sont les expériences positives ou négatives des participants Quelques exemples avec des systèmes de gestion de contenus web, tels ont été les thèmes principaux de l’atelier.

Parmi les 8 organisations invités, il y avait une diversité de situations : certaines organisations possèdent déjà des sites webs, mais n’ont aucune maîtrise de leurs plateformes (pas de propriété du nom de domaine, hébergement de sites webs gérés par des tiers dont ils n’ont aucun contrôle en matière d’administration et de changement de la structure du site, difficultés de faire des ajoux ou de poster des articles…) ; d’autres ont des problèmes dans leurs projets de sites web (la volonté est là mais le projet piétinent depuis des années sans aucun aboutissement…), et enfin certains ont pu amorcer un bon virage avec un site dynamique qui fait la fièreté de tous (exemple du site du Réseau des Chambres d’Agriculture du Niger www.reca-niger.org).

Avec ce foisonnement de situations partagées entre elles, chaque organisation a pu s’imprégner des différentes situations, et selon les dires des participant-e-s, la rencontre a été bénéfique et a soulevé un coin du voile sur la gestion des contenus sur le web que certaines personnes tendent à garder cachés pour profiter de l’ignorance de ces organisations.

Après cet atelier, l’équipe de Capitalisation avec Gilles Mersadier, Expert en Gestion des Connaissances et Genre, accompagné de Yam Pukri (Sylvestre Ouédraogo, Responsable et Asseta Sandwidi, Webmaster) ainsi qu’un jeune webmaster de Niamey et d’un consultant documentaliste ont parcouru les sièges de toutes les organisations afin de bien s’imprégner de leurs besoins précis :

Mooriben, une grande organisation paysanne faîtière, dont le semblant au Burkina est la Fédération des groupements Naam, veut un site web et vite ! Mooriben est fatigué d’attendre et veut entrer dans le monde du numérique : « sur le net, tout le monde parle de nous, mais, les informations ne viennent pas de nous-mêmes …. Chaque mois, pourtant, ce sont des dizaines de rapports qui viennent s’entasser dans nos armoires qui auraient intéressées plus d’un (prix des céréales, situation du maraichage, rapport des formations…) ;

Passage chez les Maraichers

Pour la Fédération de Coopératives Maraichères du Niger (FCMN-Niya), une grande faîtière spécialisée dans le maraichage, le site web est une préoccupation depuis plus de deux ans, il est inscrit dans leur programme d’activité : « vivement que le projet Capitalisation nous accompagne sur ce chemin afin que nos vœux se réalisent », nous dit le chargé de communication.

L’Association Nigérienne des Institutions Professionnelles de la Microfinance (ANIP-MF) …a un site web qu’elle compte remettre à jour pour le rendre plus attractif et interactif . Une des responsables nous confie : « Il y a plusieurs changements dans le monde de la micro finance et le site doit nous faciliter la tache (annonce des formations et des nouveaux textes réglementaires, publication des résultats des membres …). Nous devons convaincre nos membres de cette priorité parce que le web est une grande opportunité pour nous. Selon les nouveaux textes, toutes les organisations travaillant dans la micro finance doivent être fédérées avec nous. Nous aurons donc une plus grande quantité de données à traiter et à diffuser à une grande partie de la population qui est impliquée dans les systèmes financiers décentralisées ».

La Plateforme Paysanne du Niger (PFPN) fédère plusieurs organisations de productrices et de producteurs. Elle a bien compris les enjeux du web et possède son propre site. Néamoins, la gestion et l’administration du site se fait depuis l’étranger chez un de ses partenaires principaux. Bien que la collaboration soit bonne, la plaforme paysanne veut franchir une étape qui est de gérer son affaire elle-même : « nous voulons donner plus de dynamisme à notrre projet web en travaillant avec des partenaires qui sont plus proches de nous et qui restent à notre écoute pour les petits soins » témoignent-ils lors de la rencontre.

L’ONG VIE Kande Ni Bayra est dans le même lot : elle cherche à redynamiser son site qui est statique et manque vitalité. « On dit que notre site est joli et on est fier, mais on veut que le site devienne un outil de travail plus qu’une vitrine et on est prêt à nous jeter à l’eau », avance un des responsables de l’association.

L’équipe de capitalisation ne s’est pas limitée à scruter les besoins et attentes de ses partenaires pour les sites web, mais elle cherche également à voir comment améliorer le système de gestion des documents au format numérique et papier avec un système d’archivage pratique et simplifié. Même la gestion du courrier électronique à travers un client de messagerie comme Thunderbird et l’utilisation d’un simple disque dur externe pour sauvegarder et partager des documents seraient d’une grande aide pour ces organisations : elles sont souvent paralysées quant un collège est en mission, quand un ordinateur tombe en panne, sans parler coupures fréquentes de connexion internet qui limitent l’accès aux archives mails.

Yam Pukri est disposé à accompagner toutes ces organisations sur le chemin du numérique, forte de son expérience de plus de 12 ans au Burkina Faso et dans la sous région avec les organisations paysannes.
Un webmaster nigérien séjournera très prochainement à Yam Pukri pour mieux s’imprégner de la dynamique interne de l’association pour s’en inspirer et aider à booster le web nigérien dès son retour.

Sylvestre Ouédraogo

Yam Pukri

Grand Merci à Gilles Mersadier pour les observations et suggestions sur cet article