Vie du réseau

Sur les traces de bloggueurs burkinabé

Née aux États-Unis à la fin des années 1990, le blog est aujourd’hui un moyen d’expression très répandu sur la toile. Sur le site franc parler (www.francparler.org ) on définit le bloc-notes (entendez par là Blog) comme un "site sur la toile, souvent personnel, présentant en ordre chronologique de courts articles ou notes, généralement accompagnés de liens vers d’autres sites". Il ajoute que "la publication de ces notes est généralement facilitée par l’emploi d’un logiciel spécialisé qui met en forme le texte et les illustrations, construit des archives, offre des moyens de recherche et accueille les commentaires d’autres internautes".

Certains blogs rapportent des informations d’intérêt public ou commente un sujet d’actualité, un fait social, un événement. D’autres adoptent le ton d’un journal personnel, rapportant les faits et gestes qui constituent leur quotidien. D’autres encore utilisent la plateforme comme un espace de réflexion personnelle qui s’enrichit par le dialogue qui se crée avec d’autres bloggueurs. Sylvestre Ouédraogo, coordonnateur du réseau Bukina-ntic, un réseau de partage de connaissances et d’expériences sur les TIC compare le blog à un arbre à palabre mondial.

Des bloggeurs Burkinabé

Parmi les internautes burkinabé, quelques uns se sont appropriés cette forme d’expression libre. Pour Simon Gansé il a réussi à créer un blog. Mais cela n’est pas une idée qui m’est venue au hasard précise t-il. Ce dernier, technicien de pêche de formation d’origine béninoise vit au Burkina depuis une dizaine d’années. Avant de se convertir au métier d’imprimeur qu’il exerce actuellement, il fut enseignant, régisseur de plateau de cinéma, couturier entre autres. Durant ce parcours de combattant, Simon dit avoir rencontré beaucoup de difficultés. De ces moments difficiles, j’ai acquis beaucoup d’expériences et tiré des leçons. Ce sont ces idées que je partage aujourd’hui avec le monde entier à travers mon blog. En mettant mes idées sur le blog, je permets à d’autres personnes qui se retrouvent dans les mêmes situations que moi, de profiter de mes expériences et garder l’espoir, d’où le nom de mon blog Vie meilleure.

Contrairement à Simon, pour Ramata Soré journaliste au bimensuel l’Evénement, le blog est une source d’informations. Mon blog me permet d’avoir l’avis des gens sur tout ce qui se passe dans le monde en général, et au Burkina Faso en particulier. Sur les blog, les langues se délient plus facilement. Les gens s’expriment et parfois donnent des informations pertinentes constate-t-elle.

Sur son blog www.ramses.blog4ever.com, elle publie des articles sur l’actualité au Burkina et dans le monde, mais en triant les informations les plus croustillantes et à polémiques, ce qui suscite parfois de vive réaction de la part des intervenants sur son blog. On peut noter ce que l’on pourrait appelé l’affaire Basile Guisso., actuel directeur du Centre national de recherche en sciences et technologies et ancien ministre des relations extérieures sous la Révolution. Cet article titré Basile Guissou, un rongeur de mémoire et d’histoire, relate la polémique qu’à susciter ses propos lors de la projection débat autour de son film documentaire Sankara l’homme intègre pendant le festival Ciné droit libre.
Consulté plus de 600 fois, l’article a enregistré plus de 20 commentaires dont la réplique de l’ex ministre en question sur plus de trois pages.

Quand à Barro San Evariste journaliste et webmaster à l’Observateur Paalga un quotidien burkinabé, il a créé son blog en octobre 2006. Son blog L’heure du temps (http://barro.blog4ever.com) est le fruit de sa participation à l’atelier « Enjeux des TIC sur les media » organisé par l’institut Panos Afrique de l’ouest. C’est un blog d’information et d’analyse de l’actualité. Au départ j’y publiais mes articles uniquement. Suite aux affrontements entre militaires et policiers à Ouagadougou en décembre 2006, vu que je n’étais pas en reportage, j’ai trouvé que les articles de mes confrères pouvaient intéresser mes lecteurs. Depuis lors je reprends sur mon blog les articles de mes autres confrères que je juge pertinent.. Ce blog est devenu populaire du fait de son newsletter qui permet aux abonnés de recevoir à partir de leur boite électronique, le point sur l’actualité.

A l’image de Barro, le journaliste Koffi Amétépé a également découvert l’existence des blogs suite au même atelier de formation. Lors de la formation, j’ai été séduit par une présentation sur le blog, de ce que cela pouvait représenter en termes de liberté d’expression et de promotion des médias et du journaliste note-t-il. J’ai un blog à l’image de ce qui m’a amené à le créer. C’est à dire faire une sorte de dissidence. Dans le journalisme classique, on produit un article qu’on soumet au rédacteur en chef qui doit le valider ou le refuser. Ma dissidence n’est pas d’aller contre ce principe, mais c’est le fait d’aller directement à la publication justifie-t-il. Sur son blog le10sident, il publie ses coups de cœur et ses coups de gueule sur l’actualité Aussi, le blog est une opportunité pour lui d’être présent sur Internet. Nous avons besoin d’être aussi des acteurs sur la toile et pas seulement des consommateurs qui vont chercher des informations insiste-t-il.

Les retombées de leur blog

Au dire de Simon Gansé, créer un blog c’est croire à la philosophie qui dit que donner c’est recevoir. Quand on crée un blog, il faut l’animer. Toute chose qui demande beaucoup de connaissances personnelles. Ce que vous découvrez lors de cette quête permanente de connaissance c’est d’abord pour soi-même estime–t-il. Pour Koffi Amétépé également le blog est source de renforcement de certaines valeurs. J’ai appris grâce au blog à connaître et à aimer le journalisme citoyen. C’est-à-dire ce journaliste qui écrit parce qu’il a quelque chose à dire et non plus parce qu’il a quelque chose à vendre. La deuxième c’est l’interactivité, une valeur qui n’existe pas forcement dans le journalisme classique.
Grâce aux blog on se fait aussi une certaine expertise. J’ai été invité à une rencontre de chercheurs africains sur la communication à l’Université de Ouagadougou en 2006. A cette rencontre, j’ai présenté une communication sur le journalisme citoyen à partir de mon expérience des blogs. C’est en quelque sorte grâce au blog que j’ai pris par a ce dialogue des chercheurs
note koffi. Mon blog m’a familiarisé davantage à l’utilisation de l’ordinateur, donc de maîtriser l’outil conclut Evariste Barro.

Parlant des visiteurs

Sur le blog, à partir des statistiques l’on peut estimer le nombre de personnes qui visitent le site. Les premières semaines de mon blog, j’avais une dizaine de visiteurs. Trois (3) ans après j’ai environ 2000 visiteurs par mois témoigne Koffi Amétépé. Quand à Evariste Barro, il serait à plus de 20.000 visiteurs par mois. Selon ces statistiques, Evariste Barro estime que ces lecteurs seraient pour la plupart des burkinabés vivant à l’extérieur. Au delà de ces chiffres, la spécificité du blog c’est l’interactivité. Le feedback de la part du lecteur se fera soit par le commentaire qu’il peut laisser à la suite de l’article, soit par email ou téléphone. Par ce biais, le journaliste peut enrichir le contenu de son information. Plus encore qu’auparavant, le journaliste est sollicité et parfois, tisse une relation avec le lecteur. Je reçois énormément d’appels et de mails. Les gens réagissent sur le contenu du blog en laissant des commentaires et plusieurs m’appellent soit pour me demander plus d’information, soit pour me féliciter et m’encourager lance fièrement Evariste Barro.

Une méconnaissance notoire du blog par les journalistes burkinabé

Mais, la plupart des journalistes burkinabés n’ont pas de blog. Même ceux qui en ont la majorité on du mal à le mettre à jour. Cela s’explique soit par l’inaccessibilité à l’outil informatique, soit par l’incompétence technique voir la méconnaissance même du concept de blog. Koffi Amétépé explique cela par le fait que le journalisme est encore un métier trop passif dans notre contexte. La plupart des gens font ce qu’on leur demande de faire, ils n’ont pas envie de faire plus que cela pense-t-il. Dans mon journal je suis le seul à avoir un blog. Pourtant, nous disposons d’une connexion ADSL permanente et disponible pour tous les journalistes témoigne Evariste Barro de l’Observateur Paalga. Pour la journaliste Ramata Soré, c’est dommage que les femmes journalistes burkinabé soient remarquablement absentes de la Blogosphère. Elle note également des failles au niveau de la production dans les blogs. La plupart des bloggeurs se contentent seulement de recopier la production papier et la coller dans la version électronique. Je pense qu’il y a un travail de réécriture qui s’impose. Il faut être beaucoup plus concis, donner un angle beaucoup plus original que ce qui est paru dans le journal papier pour susciter le débat. Sylvestre Ouédraogo aussi estime qu’au sens strict du terme, on peut dire qu’il y a très peu de personnes qui blogguent au Burkina. Très souvent les gens utilisent la plateforme blog pour relayer des informations publiées dans des médias ou des sites web classiques. En ce moment, le blog devient comme un flux RSS qui centralise des données. Par contre pour le « vrai blog » la plupart des informations que l’on trouve sur le blog, textes, photos, vidéos, sont la propriété du blogueur qui attend la réaction des autres.

De nos jours, vu la cherté de réalisation des sites webs, beaucoup de gens utilisent la plateforme comme un site web dynamique et également beaucoup de sites webs dynamiques comportent les fonctions essentielles du blog. A l’image des radio communautaire ou radio « entrer parler » de la période de la révolution au Burkina, ou tout le monde avait droit à la parole, nous espérons que le blog va une fois de plus créer une liberté d’action, de réflexion et de réaction.

Roukiattou Ouédraogo

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