E-gouvernance

Le Président de CSDPPT au Burkina.

Il nous présente tout d’abord son association son organisation, son but et ses objectifs.

BJ : CSDPTT est une organisation non Gouvernementale rassemblant des salariés de la poste et de France Télécom et qui mènent des projets de développement dans le domaine des postes et des télécommunications.

Les objectifs de CSDPTT et le secteur des NTIC au Burkina Faso

B J : L’objet de l’association déclaré officiellement dans les statuts est de « promouvoir l’échange et l’aide entre les peuples notamment en apportant un soutien aux actions de développement dans les domaines des postes et télécommunications ». Concrètement ça veut dire qu’au Burkina Faso, on a installé en collaboration avec l’ONATEL et les villages concernés, des lignes téléphoniques qui permettent aux villageois d’être reliés au réseau téléphonique et donc de disposer de moyen de communication. On a également une action de coopération avec l’Association YAM-PUKRI avec qui nous avons signé une convention sur trois ans où l’essentiel est de faire de la formation et de soutenir YAM PUKRI dans son action de vulgarisation les nouvelles technologies en direction de la population. Sachant que YAM PUKRI a beaucoup de partenaires différents, nous sommes qu’un petit élément dans cette coopération. Avant ce partenariat, on travaillait surtout avec des salariés des opérateurs dans les pays ou l’on intervenait. On intervient pour l’instant au Mali et au Burkina Faso. CSDPTT compte intervenir à Madagascar, précisément dans la banlieue de Tananarive. Le projet consisterait à introduire les nouvelles technologies dans la commune, en même temps au service de la Mairie pour sa communication vers la population mais aussi en direction de la population pour qu’elle puisse bénéficier de ces moyens de communication et d’information qui sont les nouvelles technologies et Internet en particulier.

Les projets de CSDPTT

B J : Une des particularités de CSDPTT est de travailler avec des structures locales et de ne jamais avoir des agents fixes sur le terrain. Au Burkina, CSD PTT travaille avec une association qui s’appelle la SODEPOSTEL (Solidarité Développement dans les Postes et Télécommunications) qui regroupe des actifs et des retraités de l’ONATEL et de la SONAPOST. Au Mali une association plus ancienne qui s’est créée il y a 2 ans qui s’appelle l’AVDTM (association des volontaires pour le développement des télécommunications au mali). En dehors de l’installation des télécentres ruraux, au Mali CSDPTT a effectué des petites formations informelles sur l’utilisation d’un ordinateur dans la région de Mopti Elle a aussi apporté des compléments de formation aux techniciens locaux de transmission.

Les projets au Burkina Faso

B J : Quatre télécentres ruraux sont déjà installés dans la région de Toma. Un autre télécentre devrait être installé cette année dans le village de Sérékéni que j’ai été visité pendant mon séjour, c’est dans la région d’Orodara. C’est un village où une mission de CSDPTT est déjà venue faire l’étude de la connexion du village, une mission doit venir en janvier-février pour faire l’installation et pour étudier encore la connexion de 4 autres villages dont malheureusement je ne me rappelle plus le nom puisque c’est pas moi qui suit ça dans les détails.

Pourquoi Sérékini ?

B J : C’est un ami M. Nyamba qui m’a fait découvrir ce village. Au départ on devait travailler sur Sérékini, c’est un village que moi-même je fréquentais, c’est un village que je connais depuis plus de 15 ans, en ce moment on n’avait pas les moyens qu’on a aujourd’hui et on pensait installer simplement une radio. Il y a eu des problèmes pour l’attribution des fréquences, ensuite l’ONATEL a installé de la téléphonie rurale dans la région, ça retardé les choses. En réalité, ce village présente des caractéristiques de terrain qui empêchait de le relier au réseau avec le matériel qu’ installé l’ONATEL dans la région. On a pu récupérer du matériel plus adapté qui n’était plus utilisé en France et avec l’aide des techniciens, on va réaliser ce projet spécifique.

Qu’en est - il de la maintenance du matériel que vous installez ?

B J : Pour les premières installations, CSDPTT envoient des techniciens de l’association qui viennent installer les téléphones ruraux et forment le personnel local de l’ONATEL et même un responsable villageois pour l’entretien classique du panneau solaire qui alimente le système en énergie. Quand donc un problème survient, c’est à l’ONATEL d’intervenir parce que le point téléphonique fait partie du réseau de l’opérateur. Les villageois exploitent ce point comme un télécentre et cela génère donc des recettes pour l’ONATEL et aussi pour le village. Cette procédure est coûteuse pour CSDPTT qui se déplace toujours pour les études de terrain et pour les installations. Notre objectif est de ne plus participer à l’installation. Je l’ai dit à des responsables de l’ONATEL, j’en ai rencontré plusieurs, puisque des techniciens de l’ONATEL sont formés et sont en principe capable de faire eux-même les installations. Et la SODEPOSTEL, sont j’ai déjà parlé tout à l’heure, va organiser la remontée des demandes, les gérer. A nous d’envoyer alors d’envoyer le matériel par frêt aux frais de l’ONATEL ce qui nous semble tout à fait naturel et les techniciens doivent être à même pour peu qu’ils aient un peu de volonté dans ce pays pour installer le matériel directement. Donc on ne devrait venir que simplement constater que les choses fonctionnent bien et parfaire la formation des techniciens si nécessaire.

Les villageois attendent avec impatience le téléphone. Le téléphone unique qui désenclave le village, c’est un rêve pour les paysans. Pour le nouveau village ou le projet est avance.

B J : J’ai été à Sérékini et j’ai pu constater combien l’attente était forte aussi bien de la part des fonctionnaires, instituteurs ou le personnel de santé que des villageois, chacun ayant de multiples raisons d’avoir envie de disposer du téléphone . Pour ce qui est de la pérennité, on a certes une part de responsabilité mais on n’a pas la plus grosse part, j’ai eu à expliquer et aux responsables de l’ONATEL et aux amis de la SODEPOSTEL que nous on ne pouvait être qu’un espèce de chaînon manquant c’est à dire on peut faire en sorte que les choses se fassent mais que nous ne devions plus être les acteurs principaux. En effet, dans ce projet, il y a 4 acteurs, la population locale, l’ONATEL, l’association SODEPOSTEL et l’association CSDPTT. Cette dernière se charge de la formation, de la récupération du matériel en France et l’ONATEL doit se charger de l’installation avec l’aide de la SODEPOSTEL et des villageois. A terme, l’ONATEL doit être capable de remplacer le matériel usagé par du matériel, neuf.

En ce qui concerne l’informatique et Internet quelle appréciation vous pouvez faire au Burkina Faso ? Le Burkina perd du fait de l’Internet

B J : Contrairement à ce qui se passait pour les communications internationales, quand le pays paye une connexion au niveau d’Internet il n’a aucun revenu en retour. Avant il y a des calculs entre le nombre d’appels entrant d’un pays, le nombre d’appel entrant dans l’autre et on faisait une espèce de redistribution. Avec l’Internet, il n’y a plus ça. Cela veut dire que ça ne fait qu’une charge pour le pays, une charge d’autant plus importante qu’une partie des communications internationales passe par le réseau Internet. C’est une stratégie des opérateurs internationaux de prendre ce qui constitue une des ressources les plus importantes des opérateurs locaux en dérivant une partie des communications internationales pour les faire passer par leurs réseaux, ce qui constituerait une nouvelle perte de revenus pour les opérateurs locaux.

L’Internet n’est pas une priorité pour le Burkina Les infrastructures de communication ne sont pas développées et il est difficile de développer d’autres créneaux qui intéressent beaucoup plus les populations, il faut dire que 80% de la population est rurale, il n’y a que ceux qui vivent dans les villes qui utilisent Internet, par rapport à ça, je pense que ce n’est vraiment pas une priorité de développer les politiques sur Internet, informatique, mais développer une radio rurale, permettre aux populations de communiquer échanger à travers un journal local ça se sont des actions que je trouve un peu plus concrètes.

B J : Je n’ai rien à ajouter à ce que vous dites, c’est pour ça nous installons le téléphone en zone rurale parce que on considère que c’est une priorité. Cela dit y a un secteur de la société aussi pour qui il faut développer l’introduction de l’Internet pour les gens qui ont envie, qui en expriment le besoin, et pour ceux qui peuvent payer car ils ont des revenus. Ce n’est pas contradictoire les deux types de clients sont des sources de revenus pour les opérateurs, parce que sur ce que je vous ai dit sur le fait que c’est un coût important pour l’opérateur de payer sa connexion de l’Internet en même temps c’est une source de revenu assez importante.

L’Internet n’est pas un moteur de développement mais peut accompagner le développement

B J : Je pense qu’effectivement la priorité, c’est que les gens aient un moyen de communication. Je pense aussi aux étudiants aux enseignants ainsi qu’à un certain nombre de gens, peut-être même des artisans qui ont envie de vendre leur production par Internet. Tout cela participe au développement du pays, mais je pense qu’il ne faut pas se faire d’illusions comme ça existe dans certains pays en pensant que Internet est un moteur de développement, je pense que c’est une illusion. Internet accompagne le développement. Il y a une interaction entre développement des télécommunications et le développement en général, mais le développement d’Internet ne va créer de développement en tant que tel, cette illusion existe un tout petit peu.

Le Sommet Mondial du Société de l’Information ne va rien apporter

B J : Mon opinion c’est qu’on ne peut rien attendre sans une mobilisation. Nous avons lu avec un grand intérêt l’article de Monsieur Pasquali qui est ancien sous Directeur de communication de l’UNESCO et d’ailleurs nous n’avons mis en ligne sur notre site. Il explique que … d’abord on parle d’information et non de communication ce qui n’est pas normal C’est ce que l’information ça sous entend, une circulation à sens unique. Ca peut sembler un détail mais ce n’est sans doute pas anodin. Et deuxièmement, compte tenu de la morosité du secteur des télécommunications dans le monde, il écrit que ça peut être une façon de re dynamiser le secteur qui est sujet à de multiples crises. On a assisté à des scandales aux Etats Unies où on se rend compte que des dirigeants des opérateurs sont des délinquants dans la mesure où ils ont triché leur compte pour faire élever artificiellement le cours de la bourse de l’entreprise. Et en Europe ça se traduit par des dettes énormes pour les opérateurs, en France il s’agit de France Télecom, elle représente le quart du budget national de la France, ce qui est considérable. Cela se traduit par des plans de restructuration qui vont être difficile pour le personnel. Il n’y a pas qu’en France où opérateurs tombent en faillite. IL y a aussi des constructeurs comme ALCATEL qui sont obligés de licencier un peu partout donc on est vraiment dans une crise qui est dû, finalement, fondamentalement à ce qu’on appelle la mondialisation libérale. Les opérateurs qui vendent des services sont devenus des moyens de spéculer sur des valeurs artificielles au détriment du service rendu même si la concurrence a entraîné parfois de l’amélioration, des innovations de certains services, on peut considérer qu’aujourd’hui il est temps de remettre en cause cette orientation. Même si les opérateurs vivent sur leurs acquis du passé, ils risquent d’y de grandes désillusions dans les périodes qui viennent. On assiste à des faillites, à d’énormes difficultés, la concurrence est de plus en plus difficile. On a créé artificiellement cette concurrence, la théorie qu’on enseignait en économie c’était qu’un seul opérateur sur un pays était un monopole naturel, du fait du coût d’entrée sur le marché trop élevé. Puis tout à coup, les gens se sont levés, sous l’impulsion des Etats-Unis, les premiers à déréglementer dont les opérateurs voulaient aller à la conquête de nouveaux marchés à l’étranger. Il fallait créer la concurrence et partout on a favorisé l’entrée de nouveaux acteurs qu’on a aidé au départ pour qu’ils prennent une part du marché, et aujourd’hui on constate des difficultés. Ici au Burkina la concurrence n’existe que sur le mobile ce qui est une perte de revenu pour l’opérateur, moi je lis dans la presse, les débats qu’il y a avec l’ONATEL, les gens des opérateurs concurrents qui font pression sur l’ONATEL. Le sommet va lancer le business des télécoms en particulier de l’Internet, ce qui fera bénéficier plus les opérateurs internationaux que les opérateurs locaux. Les opérateurs ne sont pas encore manifestés dans la préparation du sommet. Il n’y a qu’une partie de la société civile qui s’en est emparé. Ce qui est sûr, c’est qu’il n’y a rien à attendre sans une mobilisation des salariés des opérateurs ou des utilisateurs de Internet de téléphone. Il va y avoir plutôt une espèce de récupération économique pour relancer le business en particulier le développement de l’Internet. Quand je constate ici que les jeunes en écrasante majorité n’utilisent comme adresse Internet que les adresses Yahoo ou hotmail, ça signifie que toutes les communications passent sur le réseau international n en passant par les pays occidentaux, le plus souvent les Etats-Unis, mais aussi parfois les anciennes colonies , y compris lorsque les gens communiquent avec un pays voisin soit la Côte d’ivoire même entre eux au Burkina, ils utilisent le réseau International. C’est du au marketing des sociétés occidentales et des multinationales qui développent des services qui sont extrêmement dynamiques et qui savent capter ces types de marchés. Les gens utilisent ici à 90% la messagerie pour communiquer avec des jeunes dans d’autres pays à part les communications téléphoniques c’est des revenus qui échappent au pays et qui se traduisent par la cherté des services parce quel ‘oparateru souhaite récupérer ses investissements Notre association fait partie intégrante de la société civile, elle regroupe des professionnels des techniciens des cadres du téléphone. On s’est mobilisé sur le Sommet Mondial de la Société de l’Information. On s’est mobilisé en bénéficiant en particulier de l’arrivée dans notre association de Monsieur Jean Louis Fullsack qui est ancien expert de l’UIT (Union Internationale des Télécommunications) et qui nous apporte énormément d’informations sur le fonctionnement de l’IUT. L’UIT est normalement chargé de gérer l’ensemble des problèmes des communications internationales. M. Fullsack est très critique sur l’UIT et son fonctionnement notamment depuis l’arrivée massive de sociétés de services un peu au détriment des Etats qui étaient sensés diriger l’Union Internationale des Télécommunications. C’est pour cela qu’on ne peut pas en attendre grand chose pour ce qui est des véritables besoins des populations, par exemple ici l’accès du téléphone dans tous les villages. Pour nous la vraie décision importante qui pourrait sortir de ce sommet ce serait que la communauté internationale se fixe pour objectif principal que chaque communauté de quartier ou rurale puisse bénéficier de l’accès multiservice sachant qu’il ne faut pas se faire trop d’illusions sur l’utilisation de l’Internet en milieu rural. Que tous aient un accès d’ici deux ans. C’est possible financièrement, c’est juste une question de volonté politique compte tenu du gâchis qu’on a pu constater dans le monde des télécoms. C’est pas du tout le sujet traité lors de ce sommet. Il faut qu’on se préoccupe du développement de services de base qui soient accessibles à l’ensemble de la population. Voilà un peu sur quels objectifs nous on se bagarre au sein de la population civile en tant qu’association CSDPTT, avec une remise en cause du fonctionnement de l’UIT. Discuter d’autres choses que des problèmes du secteur des télécoms, tel est l’objectif du SMSI. Exige que l’on se penche sur le développement des services de base dans chaque village, d’ici 2 ans ça pose de multiples problèmes. Celui des bénéfices des opérateurs, de la redistribution de ces bénéfices et des problèmes posés par la libéralisation, des gâchis qui en résultent et des objectifs qu’on donne aux opérateurs libéralisés au détriment des opérateurs de services publics. Ca pose toutes ces questions. Et à l’heure actuelle, le débat n’a pas lieu sur toutes ces questions. Je pense que ce n’est pas par hasard. Il s’agit plutôt d’endormir les gens et de les faire discuter sur des sujets qui ne remettent pas en cause fondamentalement la façon dont fonctionne le secteur des télécom qui a été ces dernières années un des plus gros rémunérateurs pour un certain nombre de gens et qui s’est traduit en tout cas en Europe par des pertes énormes dans la toute dernière période.

Beaucoup de gens ont perdu leurs économies en misant en bourse sur les télécoms en Europe Des milliers des gens ont perdu leurs économies en pensant qu’en bourse ils allaient pouvoir gagner plus plaçant leur argent à la caisse. Je peux vous donner un exemple : je sais qu’à France télécom les actions ont du être vendues je pense autour de 200 250FF (20 à 25000 FCFA) au moment de la mise sur le marché. Puis l’action est montée jusqu’à 1250 FF c’est à dire 125000 FCFA et maintenant elle tourne autour de 10 000 CFA. Vous imaginez par exemple quelqu’un qui a acheté 100 actions à 40 000FCFA Si maintenant l’action est à 20 000F il a perdu 100 fois 20 000F c’est à dire qu’il a perdu 2 000 000FCFA. Mais des gens ont placé des dizaine de millions. Parce qu’on a un peu trompé les gens en leur disant qu’il fallait investir la dedans et qu’on ne les as pas prévenus que le secteur était en difficulté. C’est sur que la personne tant qu’elle n’a pas vendu ses actions elle n’a pas encore perdu, mais les gens s’inquiètent parce qu’ils ne voient pas beaucoup le cours de l’action monter.

La question de la fracture numérique

B J : La fracture numérique, elle existe entre les pays et à l’intérieur d’un même pays. Ca veut dire simplement qu’il y a un fossé qui existe entre les gens qui utilisent Internet et ceux qui ne l’utilisent pas. Ce n’est que le reflet de la fracture de la société en générale, des inégalités sociales. Ce n’est que le résultat de ces inégalités sociales. C’est une illusion de penser que le développement d’Internet va régler les inégalités. Les sociétés fonctionnent comme ça, elles créent des inégalités pour un certain nombre de choses et ces inégalités se reflètent au point de vue de l’usage de l’Internet. La fracture numérique c’est le fossé entre les gens qui utilisent Internet et les gens qui ne l’utilisent pas et ce fossé c’est fondamentalement une question de moyens financiers mais aussi une question d’éducation. Dans un pays comme le Burkina Faso, les connexions sont plus lentes, elles sont beaucoup plus chères et ça augmente les inégalités qui existent ailleurs. En Europe, il y a aussi une fracture numérique parce qu’il existe aussi une couche de la population qui est extrêmement pauvre et qui n’a pas accès à ce type de service. Elles donc si pauvres que leurs priorités consistent à chercher à se loger simplement ou à se nourrir, ce qui est le lot de beaucoup de personnes en Afrique. Mais il existe aussi sur le continent africain de grosses fortunes, des gens qui font partie de la partie aisée des couches sociales de la population.

La libéralisation sauvage : créer la concurrence avant de créer les agences de régulation

B J : La libéralisation reproduit dans des pays comme le Burkina des modèles qui ont été créés en occident souvent sans recul et sans esprit critique. Disons, l’esprit critique existe mais c’est la volonté des bailleurs de fonds comme la Banque Mondiale qui imposent de créer ce modèle sans beaucoup de réflexions supplémentaires. Ce qui est étonnant c’est qu’on introduit parfois la concurrence avant de créer les agences de régulation, ou que celles-ci soient véritablement efficaces donc il y a toute une période où il se passe un peu du n’importe quoi, c’est à dire que toutes les décisions sont prises sans support juridiques. Les supports juridiques ne sont pas respectés. Il y a pas d’agence de régulation qui est sensé être une agence neutre pour régler les problèmes entre les opérateurs. En France, l’Agence de Régulation prend des décisions qui favorisent les nouveaux entrants tant que la concurrence n’a pas atteint un certain niveau, mesuré par la part de marché des ns et des autres. Il y a la volonté d’introduire la concurrence de façon artificielle en faisant des cadeaux aux nouveaux entrants, en sous estimant le prix des interconnexions simplement pour qu’ils puissent prendre une part du marché. Les pratiques dans le secteur ne sont pas tout à fait correctes. Il est difficile de donner des exemples mais on assiste à des périodes ou ils se passent des choses assez bizarres.

La libéralisation ne doit pas être un dogme

B J : La libéralisation ne doit pas être un dogme. Chaque pays à sa propre situation. Aujourd’hui la libéralisation apparaît comme un dogme venu de l’extérieur qui s’appuie sur des insuffisances des opérateurs publiques mais tout ceci ne tient pas compte de l’ensemble des phénomènes, opérateurs publics qui ne jouent pas toujours non plus le jeu en fait du développement du service public. Je pense qu’il y a des multiples raisons pour laquelle il y a des blocages dans les opérateurs dits d’Etat. Maintenant on peut dire des entreprises publiques. Le problèmes du développement des télécommunications est souvent un problème de financement. Les lenteurs sont dues soit à un manque de dynamisme soit à des raisons que je ne saisi pas tout à fait. Je ne domine pas encore la question. Il est difficile de financer le développement des télécom parce que ce sont des financements qui coûtent chers. Je pense que l’ONATEL a eu des problèmes dans le passé car elle était dirigée de façon politique. Aujourd’hui il y a une amélioration c’est à dire que l’ONATEL est une vraie entreprise publique, mais je ne pense pas qu’elle a la maîtrise de ses décisions. Je pense que dans des pays comme celui là où les ressources pour financer le développement sont rares, souvent on ponctionne les bénéfices des opérateurs pour des opérations qui ne sont pas celles pour lesquelles ils existent.

Les opérateurs de mobile sont des opérateurs qui investissent au minimum et qui gagnent énormément d’argent.

B J : Les opérateurs de téléphone mobile ont bien des d’insuffisances. Je peux dire que je ne suis pas satisfait du service. Je ne compare pas cette fois avec la France car je n’ai pas de téléphone portable en France. Je peux dire que je ne suis pas satisfait parce que l’on est coupé en permanence, je l’ai constaté moi- même. On peut considérer qu’une communication sur deux est interrompue. Souvent, on entend pas son interlocuteur et en plus c’est excessivement cher. Par exemple, vous prenez un abonnement de 2 heures, mais vous constatez que ne consommez qu’une heure et demie simplement parce que la première seconde consommée est considérée comme une minute, donc on a des coûts extrêmement élevés. En Europe les opérateurs disaient qu’ils ne pouvaient pas facturer les communications à la seconde, il a fallu une mobilisation de l’association des consommateurs pour qu’ils décident de nous facturer la seconde mais pendant ce temps, ils ont gagné beaucoup d’argent, les opérateurs de mobile sont des opérateurs qui investissent au minimum et qui gagnent énormément d’argent. Moi j’ai pas de chiffre mais il suffit de constater. Il a tout un aspect touchant à l’apparence à l’image que l’on veut donner de soi-même qui fait que le mobile se développe. Et c’est vrai qu’il faut constater quand même une facilité d’avoir une ligne, moi même j’ai été dans une agence commerciale d’un opérateur de mobile. On m’a tout de suite fourni un abonnement et j’ai pu téléphoner partout dans les 15 mn qui suivaient ça c’est satisfaisant. Mais dans un pays très pauvre tout cet argent d’où vient-il ? On peut considérer que les gens payent 5 à 10 fois plus cher. Cet argent était dépensé autrement auparavant puisqu’il était rare de pouvoir téléphoner. Et toutes ces ressources sont souvent réexportés hors du pays puisque derrière les opérateur de mobiles se cachent souvent des multinationales. C’est comme si on arrivait à ponctionner le peu d’épargne disponible et qu’elle sorte de pays puisque tous les opérateurs sont en générale dominés par des opérateurs internationaux. Ca c’est des choses sur lesquelles l’accent n’est pas mis . Il ne cependant pas être dogmatique sur le service public. De même il ne faut pas être dogmatique sur le fait qu’il faille libéraliser partout et n’importe comment. Le service public à des insuffisances et il faut rechercher pourquoi et je pense qu’il est en mesure de s’améliorer mais c’est tout une question d’environnement politique .

Qui est Bruno JAFFRE ?

Je suis un homme ordinaire mais j’essaie d’être tout simplement utile Je suis quelqu’un d’ordinaire, je suis marié, j’ai deux enfants, je suis salarié, je suis quelqu’un d’ordinaire j’ai pas grand chose à ajouter, si je me suis engagé ici c’est parce que je fréquentais le pays depuis longtemps. Comme beaucoup, je me suis dis que je pouvais être utile, voilà pourquoi je me suis engagé la dedans. C’est vrai que mon action est aussi concret’ dans ce pays. J’essaye aussi d’introduire le débat au sein de la société civile, parce que on a beaucoup de ménage à faire entre nous, d’avancer des idées qui résultent de notre expérience, sur la façon de procède. Le piège de l’assistance est permanent. Certains ONGs se créent rapidement sans forcément répondre à un besoin exprimé et cherchent à tout prix à aider quelqu’un qui reste imaginaire et non identifié. Alors qu’il faut prendre le temps de choisir des partenaires solides qui vont même nous critiquer, il faut accepter les critiques, il faut prendre le temps c’est la seule façon d’être efficace.

Burkina Ntics Interview réalisé par Somda Théodore

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